14.12.04

Un témoignage dans l'Express

A lire absolument le dossier de l'Express du 13/12/2004 : le monopole de la Sécu est-il menacé ?

On y trouve un nouveau témoignage que je cite in-extenso :
L'Express du 13/12/2004
Le monopole de la Sécu est-il menacé?
par Anne Vidalie

Un salarié a-t-il le droit de quitter la Sécurité sociale pour faire jouer la concurrence et contracter une assurance-maladie privée? Si c'était le cas, la solidarité, fondement de la protection sociale à la française, volerait en éclats. La question divise juristes et autres experts, mais, de toute façon, une évolution du système est inéluctable

Cédric Chevalier, 26 ans, ingénieur dans une société de services informatiques, jubile. «Très peu de gens le savent, mais il est possible de quitter la Sécurité sociale. La preuve: je l'ai fait», dit-il tranquillement. C'est la réforme de l'assurance-maladie concoctée par Philippe Douste-Blazy, énième du genre, qui a poussé Cédric à la désertion. «J'ai tout simplement tapé «Quitter la Sécurité sociale» sur un moteur de recherche, et j'ai atterri sur un site qui milite pour la liberté d'assurance, raconte le jeune homme. Là, j'ai tout trouvé: les textes officiels qui ouvrent l'assurance-maladie à la concurrence, les coordonnées de cinq assureurs privés agréés, tous étrangers, qui garantissent les ressortissants européens contre le risque maladie, ainsi que la marche à suivre.»

Depuis le 1er décembre, Cédric n'est plus affilié au régime maladie de la Sécu, sauf pour les indemnités journalières. Désormais, il compte bien ne plus payer la CSG (contribution sociale généralisée), ni la CRDS (contribution au remboursement de la dette sociale), ni la part salariale de la cotisation d'assurance-maladie. Avec la bénédiction de son employeur. «Mon patron a été très surpris quand il a reçu ma lettre recommandée l'avertissant de ma décision de contracter une assurance-maladie privée auprès d'une compagnie anglaise. Dubitatif, aussi. Vérification faite auprès de la direction des ressources humaines, il n'a rien trouvé à redire.» Mieux, son entreprise devra lui rétrocéder la part patronale des cotisations maladie qu'elle n'aura plus à acquitter pour son compte - soit 12,8% de son salaire brut. Cédric Chevalier a fait ses comptes: «En contrepartie, mon assurance-maladie privée me coûtera 112 euros par mois. Plus quelques timbres pour expédier mes feuilles de maladie à Bristol et un peu plus de paperasserie. Au total, je suis très largement gagnant, puisque mon salaire net augmentera de 22%!» Son prochain objectif? Appliquer la même recette à l'assurance-retraite.

Cédric Chevalier et son employeur enfreignent-ils la loi, fût-ce de bonne foi? Ou bien ont-ils raison? Le monopole de notre bonne vieille Sécu, fondée au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, a-t-il vécu? Les coups de boutoir de la concurrence, érigée en pierre angulaire de la construction européenne, l'auraient-ils mis en pièces? Si tel était le cas, ce serait la fin de la solidarité qui fonde ce monopole. En clair, nos cotisations sociales alimentent aujourd'hui un pot commun qui verse des prestations aux malades, aux retraités et aux accidentés du travail, indépendamment de leur situation professionnelle et financière. La voie serait libre, alors, pour les assurances individuelles. On paie, on est couvert. On ne paie pas ou on ne peut pas payer, on ne touche rien. Chacun pour soi, en somme. L'Express a voulu y voir plus clair en écoutant les arguments juridiques des pourfendeurs du monopole et en interrogeant les spécialistes du droit. L'unanimité n'est pas de saison.
A lire aussi dans ce dossier Claude Reichman : «Les monopoles sociaux ont été supprimés par l'Europe» et Jean-François Prévost «La concurrence joue pour l'intégralité des risques sociaux».

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